Michel Kohon est « baby-boomer ». Il a vécu en France et aux Etats-Unis et a en particulier travaillé à San Francisco à la fin des années 1990, au moment de l’avènement d’Internet. En novembre 2015, il a participé à notre session d’open-innovation « dans un monde qui change, vieillir est un futur à inventer », pendant lequel une cinquantaine de baby-boomers ont réfléchi à leur futur vieillissement. Aujourd’hui, il coache de jeunes entrepreneurs. Le 13 septembre, il a assisté à la 4e conférence TEDxParis (dont BNP Paribas Cardif était partenaire officiel) consacrée au futur vu par la génération Z et intitulée : « le nouvel âge dort » ? Il nous livre ses impressions sur cet événement ainsi que sur l’avenir des relations entre cette génération et la sienne.
Génération Care : Quel regard portez-vous sur cette génération qui a pris la parole lors du dernier TEDxParis ?
Michel Kohon : Je me suis senti très proche de ces jeunes, de leurs problèmes. Je coache de jeunes créateurs et je suis très au contact des 3 générations, X,Y,Z : je me sens en harmonie avec eux.
Je me suis également senti triste de constater que nous leur avons laissé un territoire où tout est à reconstruire. Nous avons créé Internet, nous leur avons donné la possibilité d’accéder à beaucoup de choses instantanément, de communiquer à tout moment, mais parallèlement, les structures des grandes sociétés, particulièrement en France, restent très napoléoniennes ; cela ne correspond plus du tout à ce que les jeunes expérimentent tous les jours. Avec l’avènement de ces nouvelles technologies, qui sont devenues quasiment gratuites pour tout le monde, les structures créées par le XIXe siècle sont amenées à disparaître. C’est ce qu’on appelle parfois l’ubérisation, c’est dans ce modèle qu’évoluent les jeunes.
G.C. : Ces jeunes, qui ont tout à inventer, se sont pourtant montrés très optimistes pendant ce TEDxParis…
M. K. : Les jeunes sont pleins d’optimisme, c’est vrai, mais ils m’ont fait réfléchir au fait qu’on leur a laissé une situation qui est très difficile à gérer. Ma génération a connu la paix, l’argent, la fortune, la création d’Internet… Mais nous ne les avons absolument pas préparés à ce qu’ils allaient devoir faire, à savoir une révolution complète contre des structures établies. Aujourd’hui, les jeunes sortent de l’université avec un Bac + 5 qui ne leur sert à rien. C’est un énorme challenge ! Ils ont tout à inventer, sur des choses dont ma génération n’a pas l’expérience. Comment inventer un nouveau mode d’éducation pour leurs enfants, un nouveau mode de travail, un nouveau mode politique ? Les Français, sans s’en rendre compte, sont extrêmement individualistes, ce qui est à mon avis une faiblesse. Or j’ai cru sentir au travers de cette génération que ce n’est peut-être plus le cas. Ils ont peut-être compris qu’on pouvait s’en sortir en faisant les choses ensemble.
G.C. : Tout inventer, c’est aussi un point commun avec les baby-boomers qui peuvent inventer le « vieillir de demain ». Pensez-vous que les deux générations puissent le faire ensemble ?
M. K. : Bien sûr ! Mais ma génération a probablement plus à apprendre de la leur que le contraire. Ce que nous avons appris n’a pas une grande importance, sauf peut-être la méthode de raisonnement logique.
G.C. : Vous coachez des jeunes, que pouvez-vous leur apporter ?
M.K. : Je voudrais vraiment inviter tous les gens de ma génération à leur consacrer du temps –nous en avons- à les encourager, et à leur parler de leur expérience de vie. C’est la principale chose que nous pouvons leur apporter : comment se débrouiller avec l’environnement, avec des clients, avec des nouveaux produits ? Comment essayer de transcrire des expériences vécues ? Ils ont besoin de savoir comment se débrouiller avec le côté humain. C’est aussi à eux de venir nous dire ce dont ils ont besoin.
Propos recueillis par Sandrine Goldschmidt