A la tête d’une agence de communication digitale, Pierre Calmard est un passionné du monde qui l’entoure. Agé de 47 ans, il a commencé par des études de philosophie avant de se tourner vers le marketing et de devenir ingénieur statisticien à l’ENSAE, puis diplômé d’HEC, avant de rejoindre Médiamétrie. Il a créé il y a 4 ans iProspect France, devenu un leader en conseil digital. Passionné par la réflexion sur l’avenir de l’humain, la science et la science-fiction, il vient de publier un livre prospectif, « L’homme à venir »¹, dans lequel il réfléchit aux transformations que l’espèce humaine va connaître dans les années à venir. Lors de notre matinée d’immersion du 5 novembre, il viendra donner des pistes de réflexion aux baby-boomers sur ce monde qui change et qui reste à inventer.
Génération Care : Qu’est-ce qui vous motive à participer à cette étude prospective ?
Pierre Calmard : Le sujet dont je m’occupe, c’est la façon dont le digital est en train de modifier profondément l’être humain. Cette révolution ne touche pas uniquement la communication, elle modifie l’espèce en elle-même. L’allongement de la durée de la vie, qui est selon moi inéluctable, va bouleverser profondément ce que nous sommes. Nous ne serons bientôt plus des êtres humains au sens traditionnel.
Tout ce qui a trait à la réflexion autour de ces changements me passionne. Ce sont les débats et les idées d’aujourd’hui qui contribueront à donner la forme, l’essence, les contours de nos descendants. Il est très important de pouvoir discuter de nos théories avec des citoyens et des consommateurs, qui sont au cœur de ces évolutions. En outre, diffuser le sujet auprès de professionnels de la prévoyance ou l’assurance est passionnant ; ces métiers vont connaître un bouleversement total dans les années à venir.
G. C. : Que vous inspire le mot d’ordre de l’événement : « Dans un monde qui change, vieillir est un futur à inventer » ?
P. C. : Dans mon livre¹, l’un des premiers préceptes que je donne pour l’avenir de l’être humain, c’est de chérir son désir. Pendant des millénaires, on a enfermé le désir dans une logique moralisatrice et obscurantiste, pour maintenir une cohésion sociale. Aujourd’hui on est à un point de retournement que je trouve intéressant, la question du désir de vivre va devenir centrale. La sublimation du désir va devenir essentielle, parce que vivre 80 ans, avec l’idée de contrôler son désir, conduit gentiment à l’oubli, puis à la mort lente. Mais à partir du moment où vous allez vivre 300 ans, ou mille ans, entretenir le désir devient absolument crucial – je dirais même littéralement « vital ». Sans quoi un paradoxe inédit émergera : à quoi bon pouvoir techniquement vivre un millénaire, si c’est pour s’ennuyer au bout de 150 ans ?
A mon sens, toute la morale et la façon dont on a structuré le désir doivent changer fondamentalement dans les années à venir.
G. C. : Donc c’est cela qui est à inventer ?
P. C. : Oui, très clairement. La longévité, ce n’est pas seulement techniquement vivre vieux. Magnifier le désir est un élément clé. La longévité est consubstantielle de la question du désir. Ne pas s’en occuper, c’est se condamner à une mort certaine, paradoxalement plus rapide que celle de notre propre corps.
Propos recueillis par Sandrine Goldschmidt
¹ « L’homme à venir » de Pierre Calmard
Broché: 224 pages
Édition : Editions TELEMAQUE (19 février 2015)
Collection : Prospectives
Langue : Français