« On ne nait pas femme, on le devient », a écrit Simone de Beauvoir. Mais comment devient-on grand-mère… ? Par quels changements en soi et autour de soi cette transformation inévitable s’accomplit-elle ? Danièle Flaumenbaum, médecin, nous éclaire avec son livre « Les passeuses d’histoires ».
L’annonce faite à mamie
« Troublée », « émue ». Lorsque son fils lui a appris au téléphone qu’elle allait être grand-mère, Danièle Flaumenbaum a ressenti un mélange d’émotions. Ce moment de joie est parfois « un choc » pour d’autres. Toute sa vie, l’auteur, longtemps gynécologue et acupunctrice, a soigné des femmes. C’est donc naturellement qu’elle à réfléchi aux bouleversements et états d’âmes traversés, afin de construire ce récit universel sur un ton simple. Il y est question de son propre cheminement. « Je deviens grand-mère écrit-elle, et je me sens habitée d’une énergie nouvelle (…)
Je réfléchis à la place qui est maintenant la mienne dans la famille et le temps de la grossesse de ma belle-fille ne sera pas de trop pour que j’intègre ma nouvelle situation… »
« Une mutation »
L’auteur met en relief la vieille croyance que « tout se passera comme sur des roulettes » pour souligner, bien au contraire, tout un panel d’émotions envahissantes. Prendre conscience que son enfant est devenu lui aussi un adulte ne va pas forcément de soi ! « Pour bien me positionner, il fallait que j’accepte de me retrouver dans la dépendance de mes propres enfants »
dit-elle. Pour nous permettre de mieux saisir la place des grands-parents aujourd’hui, Danièle Flaumenbaum revient sur les grandes dates clés de l’évolution des droits des femmes : du droit de vote en 1944 en passant par la gestion de leurs biens en 1967 à la libération sexuelle qui a suivi, elle mesure l’écart incroyable entre l’image de la « mamie » des années avant 70, « tournée vers le deuil et la douleur » et celle des femmes de notre époque dont la parole s’est libérée. Ces femmes dont l’espérance de vie s’est allongée considérablement sont en charge, pour Danièle, « de rétablir la vérité des familles. » Nos grand-mères doivent, à ses yeux, transmettre leur expérience et surtout dire les secrets cachés pour libérer leurs petits-enfants de souffrances à venir ! Vaste mission.
Un pont de transmission
En 2006, l’ex-gynécologue a connu un grand succès en librairie avec
« Femme désirée, femme désirante* ». Or, dans ce texte, il est aussi question de désir.
Celui de vivre – sans occulter la mort – que les plus âgées doivent transmettre aux plus jeunes.
« Les grand-mères sont là, ajoute-t-elle, pour raconter la vie. » Alors certes, lire qu’elles devraient particulièrement parler de la sexualité à leurs petites-filles peut surprendre. Sauf qu’elles ont fait le chemin d’une vie, aimé, vécu. Elles sont en capacité, désormais, de partager leurs histoires pour
« montrer la route ».
Marina Lemaire
Les passeuses d’histoires, de Danièle Flaumenbaum
*édition Payot. 113 p, 12 €.
crédit photo : droits réservés Patricia Canino