Tandis que le concept de co-working remporte un large succès auprès des travailleurs et des entreprises, celui de no-working pourrait bien charmer plus d’un senior, retraité ou en voie de l’être. Ouvert à Bordeaux en mai 2018, l’Atelier de No-Working dépoussière les codes du club senior pour offrir aux 55 ans et plus un espace résolument design, axé sur le numérique, la créativité, le sport, la détente et le partage. Un premier lieu « test » pour prévenir la perte d’autonomie et l’isolement.
Il n’y a qu’à pénétrer par la porte principale de l’Atelier de No Working, 19 rue Achard à Bordeaux, pour savoir qu’il ne s’agit pas d’un club sénior classique ni même de l’un des 30 espaces de coworking de la capitale girondine.
Ici on découvre en effet 300m2 aménagés au goût du jour et pour favoriser la convivialité entre ses membres. Outre l’espace atelier doté d’une grande table et d’un large tableau à craie, ce nouveau lieu bordelais dispose de cloisons amovibles pour moduler les m2 et créer, par exemple, une salle dédiée aux activités physiques de groupe. Il y a aussi un espace salon et bibliothèque pour échanger, lire, ou siroter un thé ou une boissons fraiche. Des lieux ouverts et collectifs auxquels s’ajoutent trois espaces dédiés à la pratique individuelle : un pour la relaxation, une pièce dotée d’un bassin de flottaison pour une expérience ressourçante sans pareil, et une petite salle de fitness équipée de quatre appareils.
« Nous avons souhaité casser les codes des clubs seniors, qui souffrent d’une image vieillotte, pas vraiment gaie et peu propice à la rencontre, pour répondre aux attentes de personnes qui sont aujourd’hui des baby-boomers pour la plupart et ont de nouvelles attentes par rapport aux générations précédentes. Nous n’avons rien inventé finalement. Nous avons seulement imaginé et conçu un lieu qui puisse plaire au plus grand nombre dès l’âge de 55 ans et bien après », explique l’un de deux cofondateurs de l’Atelier de No Working, Benjamin Patat.
Pour des seniors dynamiques et qui le restent !
Ce lieu est né de plusieurs années d’observation et d’expérience accumulée dans le service d’aide aux personnes âgées. Benjamin Patat et son frère, Sébastien, ont en effet commencé par créer Unicare Services en 2015. Une entreprise de soutien à domicile s’adressant à des personnes fragiles, dépendantes, souvent très âgées et atteintes de maladies neuro-dégénératives. « Et nous avons pu dresser plusieurs constats, raconte Benjamin Patat. D’abord, la majorité des personnes vieillissantes veulent pouvoir rester à domicile. Mais nombreuses sont celles qui n’exercent plus d’activité physique et/ou sont isolées. Un tiers des personnes de plus de 60 ans ne sort pas tous les jours de chez soi ».
Ils ont donc acquis une conviction : le vieillissement est une question qui s’anticipe. « Commencer à avoir les bons reflexes pour se maintenir en forme à 85 ans, c’est un peu tard. Et il est difficile de re-proposer des activités, des échanges et des rencontres à des personnes qui en ont perdu l’habitude. L’isolement entraine l’isolement », poursuit Benjamin Patat.
Aussi a-t-il voulu avec son frère proposer une offre nouvelle qui s’adresse à un public senior très large dès l’âge de 55 ans. Ouvert de 9h à 18h du lundi au vendredi, l’Atelier de No Working permet donc aux jeunes retraités comme aux plus âgés d’assister à des activités en groupe notamment. Après des études de design et une expérience dans un Fablab, Caroline dispense aujourd’hui des ateliers créatifs ou de prise en main des outils numériques aux membres de l’espace. Chaque semaine, le planning change. Origami, dessin, déco, confection de produits en mode « do it yourself », ou ateliers pour manier son Smartphone, les messageries instantanées et les réseaux sociaux, autant de thématiques autour desquelles sont invitées à participer 6 à 8 seniors. En juillet, des évènements mini no workers ont même été organisés afin que grands-parents et petits-enfants apprennent et partagent autrement.
A cela s’ajoute des activités sportives de groupe. Des cours d’équilibre et postures, de renforcement musculaire, de travail cardio ou encore de relaxation sont organisés une fois par jour par des coachs sportifs tous titulaires d’un diplôme Staps Activités physiques adaptées.
Sans contraintes…juste un lieu qui donne envie
Mais les seniors peuvent aussi réserver des activités individuelles ou tout simplement venir dans le grand espace convivial en accès libre. « Cette salle est très importante à nos yeux. Aujourd’hui lorsqu’on propose un atelier, on ne conçoit pas qu’un membre y assiste puis s’en aille. L’idée est de pouvoir profiter de l’espace pour discuter avec les autres, échanger sur un atelier ou la crainte d’assister à une activité physique par exemple. Nous voulons que ce soit un espace « repère » dans le quartier. L’idée c’est bien que le partage se fasse naturellement et que les membres s’inspirent entre eux », argue Benjamin Patat. Ainsi, de manière inconsciente le plus souvent, les seniors vont entreprendre des actions qui vont leur permettre de rester en forme, vifs, indépendants et connectés aux autres.
Pensé comme un lieu pour tous les seniors, le système d’adhésion a aussi été réfléchi pour ne pas être contraignant. Aussi les personnes peuvent-elles profiter de la salle commune, des ateliers ou des activités individuelles en réglant une cotisation annuelle de 15 euros puis en payant à la carte. Elles peuvent aussi opter pour un engagement mensuel. L’offre temps plein en solo (125 euros) ou en duo (150 euros), comprend 3 ateliers à choisir parmi les activités créatives, numériques ou physiques, la consommation de boissons chaudes et froides, et le libre accès à tous les autres espaces. Et l’offre temps partiel (75 euros) se limite au choix de trois ateliers et à l’accès à l’espace convivial, les autres espaces de pratique individuelle pouvant être réservés moyennant un paiement à la carte.
Après quelques semaines, les retours sont excellents. Le lieu plait beaucoup et compte déjà une dizaine de membres, âgés entre 60 et 85 ans. « A notre époque, il y a clairement de la place pour ce type de lieux, estime finalement Benjamin Patat. Nous allons laisser passer la première année pour éprouver le concept, et faire qu’une communauté de personnes se construise et s’empare du lieu. Et si cela fonctionne, il faudra assurément en créer d’autres en ville, et pourquoi pas adapter le concept en milieu rural ».
Usbek&Rica