La part des personnes âgées de plus de 60 ans va augmenter dans les prochaines décennies. Les offres des banques et des compagnies d’assurances prennent-elles suffisamment en compte ce phénomène ? Si certaines d’entre elles commencent à le faire, cela reste encore insuffisant.
Selon l’Insee, en 2050, un Français sur trois devrait être âgé de 60 ans ou plus, contre un sur cinq en 2005. L’allongement de la durée de vie change la donne dans de nombreux secteurs. C’est notamment le cas pour ceux de la banque et de l’assurance. « Les seniors sont sans nul doute ceux dont les besoins à satisfaire sont les plus diversifiés. Encore jeunes et dynamiques, loin des clichés des personnes « âgées », ils entendent profiter de leur retraite et ne pas se priver, attachent une importance particulière à leur bien-être et au bien-vieillir, à leur autonomie » expliquait Sabine Gräfe, directrice du pôle banque assurance chez Precepta (groupe Xerfi) dans une tribune publiée dans l’Agefi. Ces attentes spécifiques, et in fine les besoins qui s’y rattachent, offrent de réelles opportunités sur les activités dites « traditionnelles » à l’instar de la santé, de la prévoyance, de la gestion de l’épargne, mais aussi sur celles plus « récentes » à l’exemple du crédit à la consommation, des services à la personne, jusqu’à la dépendance ». Pourtant, ces établissements sont encore peu présents sur le segment des aînés. « Banques et assureurs procèdent par tâtonnement auprès de cette cible qui doit être considérée comme stratégique » relève Sabine Gräfe.
Emprunter après 60 ans coûte plus cher
Lorsqu’une personne de plus de 60 ans veut emprunter, elle doit faire face à certains obstacles. Certes, les banques prêtent désormais plus facilement aux seniors qui s’endettent pour acheter une résidence secondaire ou un investissement locatif, à condition que ces derniers remboursent leur emprunt avant 80 ans révolus (parfois 85 ans). En revanche, l’emprunteur n‘échappe pas au questionnaire de santé complet et à une batterie d’examens médicaux.
Autre souci : l’assurance emprunteur, souvent indispensable, coûte beaucoup plus cher. Elle permet notamment de garantir le prêt en cas de décès. « Plus on avance en âge, plus il est difficile et coûteux d’assurer son prêt. L’âge est considéré comme un facteur aggravant pour les problèmes de santé et donc comme un risque accru pour l’assureur » précise le site Acommeassure.com. Par exemple, pour un prêt de 100 000 euros sur 15 ans, l’assurance s’élève à 0,15 % pour un emprunteur âgé de 40 ans et à 0,55 % s’il a 60 ans. En outre, la plupart des contrats de banque prévoient que la garantie décès cesse à 70 ans, voire 75 ans.
Depuis la loi Lagarde votée en 2010, la « délégation d’assurance » permet à l’emprunteur de s’assurer auprès d’un autre établissement que celui qui fait le prêt. Certains établissements proposent des contrats spécifiques permettant une adhésion jusqu’à 85 ans et une fin de prestation d’assurance décès jusqu’à 90 ans (c’est le cas par exemple de Metlife, Axa, Suravenir, Cardif ou encore AFI ESCA).
Crédit à la consommation : plusieurs solutions
En dehors d’un achat immobilier, les seniors ont parfois besoin de faire un prêt à la consommation. Cela pour financer, par exemple, des travaux destinés à adapter leur logement, une aide à domicile ou même un voyage. En effet, selon le rapport de l’Observatoire des crédits aux ménages, les ménages de 65 ans et plus ont significativement accru leur recours au crédit à la consommation et au découvert bancaire au cours des dernières années. En 2013, près de 25 % d’entre eux détenaient des crédits à la consommation, contre 17 % dix ans plus tôt. Ces prêts sont plus facilement accordés aux seniors en raison de leur durée relativement courte.
En cas de difficulté, d’autres formes de crédits ont été développées pour les seniors. Il s’agit du prêt viager hypothécaire proposé par le Crédit Foncier ou encore du prêt hypothécaire cautionné lancé par le Crédit Immobilier de France. Ces deux prêts prennent en compte la valeur du logement de l’emprunteur pour évaluer sa solvabilité, contrairement aux crédits classiques qui ne tiennent compte que des revenus de l’emprunteur. En outre, ils permettent de se passer d’une assurance décès qui coûte cher. Cela peut concerner de nombreux seniors car près de 75% des personnes âgées de 60 ans et plus sont propriétaires de leur résidence principale.
Assurance santé : des offres spécifiques
L’un des rares domaines où les seniors sont au coeur du marketing des bancassureurs est celui de l’assurance santé. La quasi-totalité des mutuelles et des assureurs propose leur offre dédiée aux plus de 60 ans. En effet, lorsqu’ils sont retraités, les seniors n’ont pas toujours accès au contrat collectif de leur ancienne entreprise ou ils ne bénéficient d’aucune condition tarifaire avantageuse. Du coup, il est souvent plus économique de souscrire une mutuelle individuelle. Les assureurs développent des offres adaptées à leurs besoins spécifiques comme le port de verres progressifs, de prothèses auditives ou encore la possibilité de suivre une cure thermale. Ces contrats peuvent être souscrits jusqu’à un âge avancé (par exemple, chez April ou la Mutuelle UMC), certains peuvent même y adhérer sans limite d’âge. En outre, certaines mutuelles proposent une garantie « viagère », donc à vie, qui les empêche de résilier le contrat (sauf si le souscripteur le souhaite ou s’il ne paye pas ses cotisations).
En dehors de la santé, les établissements financiers sont encore loin de proposer des offres réellement adaptées aux besoins des seniors. Ils vont donc devoir se pencher sur leurs problématiques pour fidéliser cette clientèle qui a déjà généralement constitué son patrimoine et qui a des aspirations nouvelles.
Juliette Péronne