Alzheimer, ça fait peur. La démence, ça terrorise. Mais la confusionite, c’est nettement moins effrayant, non ? Et pourtant, c’est la même maladie. Et c’est plus juste, affirme Colette Roumanoff, qui vient d’écrire et de mettre en scène la pièce « la confusionite ». Elle a pris le parti d’en rire, non pour se moquer, mais pour participer au changement de regard sur la maladie et permettre à la société de s’adapter à cette nouvelle donne qu’est « la confusionite ».
Pour Colette Roumanoff, auteure et metteur en scène, et dont le mari a été diagnostiqué Alzheimer il y a 7 ans, la confusionite, c’est une maladie difficile à laquelle il faut s’adapter. Mais ce n’est pas forcément un drame. Mieux, la maladie suscite des situations qui peuvent être cocasses, à condition de ne pas être stigmatisantes. C’est ce qu’elle a voulu montrer dans la pièce qu’elle a écrite et mise en scène*. « La confusionite », c’est un vaudeville, dont le personnage principal est atteint de la maladie d’Alzheimer. Il ne sait plus où il en est, ni ce qu’il a dit ou fait l’instant d’avant, il confond rosier et chardon… mais au final, il n’est pas forcément le personnage le plus malheureux de l’histoire…
L’intrigue est simple : un mariage, le père de la mariée est atteint d’Alzheimer, la mère du marié revient d’Australie pour l’occasion… et trouble la fête et l’ambiance sans stress mise en place autour du malade. Elle annonce à son fils que son père -qu’il n’a jamais connu- lui donnera 1 million d’euros s’il annule la cérémonie. Quel choix devra faire le jeune homme, qui saura le conseiller le mieux ? Parlant avec son cœur, le malade d’Alzheimer, joué par Patrice Vion, formidable acteur, sera celui-là. Et chacun se retrouvera changé -en mieux- par la confrontation avec le malade, une fois les clichés et les peurs écartées.
L’autre personnage important de la pièce, c’est l’aidante-épouse, qui montre comment elle a adapté sa vie, créé un « bunker » autour de son mari pour le protéger de toute forme de stress, cette caractéristique du monde moderne qui renforce la confusionite. Une occupation de tous les instants, mais qui lui rend son mari, et rend possible des instants de bonheur.
Ces personnages sont clairement les doubles théâtraux de Colette Roumanoff et son mari. Après une période difficile d’adaptation, ils ont appris à vivre avec la maladie, et ont découvert que leur vie, un peu différente, pouvait toujours être agrémentée de moments joyeux. Pour cela, la nécessité de changer de regard, de discours et de façon de parler de la maladie sont essentiels. Et depuis des années, Colette Roumanoff s’insurge contre les discours qui, parfois pour alerter sur la nécessité d’une mobilisation nationale conte Alzheimer, ont renforcé le caractère dramatique de la « confusionite ». Elle a créé un blog, intitulé « Bien vivre avec Alzheimer », et sensibilise maintenant par le biais du théatre.
Le point fort de la pièce, c’est de dédramatiser, en montrant qu’on peut aussi rire de cette maladie, non pas aux dépens des malades, mais avec eux.
Sandrine GOLDSCHMIDT
*La confusionite s’est jouée en octobre à la manufacture des Abbesses et le spectacle sera repris en janvier au théatre Fontaine : dimanche 11 à 16h, le lundi 12 à 14h30 et le mardi 13 à 15h