L’impression 3D promet de belles applications dans le domaine médical. Les prothèses, les médicaments et les transplantations d’organes pourraient offrir la promesse de vieillir à moindre coût.
414,3 milliards de dollars. C’est le montant total des dépenses de santé pour les individus de plus de 65 ans aux États-Unis, soit plus de 100 milliards supplémentaires par rapport à 2001. Chaque senior américain débourserait ainsi en moyenne près de 10 000 dollars par an pour ses frais de santé. Les personnes âgées de plus de 65 ans devenant une part grandissante de la population américaine (14,5% en 2014 contre 21,7% en 2040), l’impression 3D ne pourrait-elle pas offrir une opportunité de réduire ces frais exorbitants ?
Les prothèses, un marché naturel
Le remplacement de la hanche et du genou figurent parmi les chirurgies les plus pratiquées aux États-Unis. Plus d’un million d’opérations seraient en effet conduites chaque année. Les prothèses constituent ainsi une cible évidente de l’impression 3D. Pour l’heure, la Food and Drug Administration (FDA) a déjà autorisé la commercialisation de plus de 85 appareils médicaux imprimés en 3D. En 2013, la Mayo Clinic, fédération hospitalo-universitaire de renommée mondiale, commençait à s’aider de l’impression 3D pour la création de hanches artificielles. Aujourd’hui, certains acteurs poussent la personnalisation jusqu’à transformer les prothèses en de véritables oeuvres d’art, à l’image du projet mené par 3D Systems en collaboration avec une étudiante en design ayant perdu une partie de sa jambe suite à un accident de voiture.
Outre le bas coût et la capacité de personnalisation, l’impression 3D permet également de créer des implants chirurgicaux à même de mieux s’intégrer dans l’organisme. Une personne sur quatre âgée de plus de 85 ans est susceptible de souffrir d’une douloureuse arthrite de la hanche. Or les implants imprimés en 3D peuvent permettre de maximiser les chances de succès de l’arthroplastie totale de la hanche. L’éditeur Autodesk distribue ainsi depuis 2015 un logiciel de conception de prothèses orthopédiques qui peuvent s’intégrer facilement avec l’os par le biais d’une structure poreuse imprimée en 3D.
3D Systems travaille sur les prothèses de jambe
L’impression 3D de médicament, rêve ou réalité ?
L’impression de médicaments en 3D sous ses traits quelque peu futuristes est aujourd’hui une réalité aux États-Unis. En août dernier, la Food and Drug Administration (FDA, l’autorité régulatrice des produits alimentaires et médicamenteux aux États-Unis) a donné son accord pour la commercialisation du Spritam, un médicament fabriqué par impression 3D qui intervient dans le traitement de l’épilepsie. Ici, l’impression 3D sert principalement le confort du patient. Elle rend en effet possible la concentration en un seul comprimé d’une forte dose médicamenteuse afin d’éviter l’ingestion de multiples médicaments. Aussi, cette technologie permet d’augmenter les capacités de dissolution du médicament, ce qui facilite la prise de traitement lourd.
L’Université Nationale de Singapour qui a récemment développé une imprimante 3D pour créer des substances médicamenteuses a, quant à elle, mis en lumière l’avantage offert par l’impression 3D de personnalisation des traitements, à savoir réaliser des doses parfaitement adaptées aux patients.
L’impression 3D, un marché porteur
L’impression 3D, autrement appelée « fabrication additive » désigne la synthétisation d’objets en trois dimensions, utilisée à l’origine pour le prototypage. Parmi les techniques d’impression 3D, on retrouve le modelage par dépôt de matière en fusion (Fused Deposition Modeling – FDM) et la stéréolithographie (SLA), au cours de laquellel un laser UV solidifie une couche de plastique liquide.
D’après l’entreprise d’études de marché IDC, le secteur de l’impression 3D devrait enregistrer une croissance annuelle de 27 % pour atteindre 26,7 milliards de dollars sur les 3 prochaines années. Du matériel de recherche à destination des laboratoires aux pièces de fusée en passant par des aliments sur mesure, les imprimantes 3D présentent aujourd’hui des applications concrètes pour de nombreuses industries. La santé n’y échappe pas. Bien au contraire, le domaine profite amplement des bénéfices de cette technologie.
Création de tissus vivants
Aujourd’hui, l’impression 3D a pu donner naissance à des tissus vivants. Le défi réside toutefois dans sa capacité à créer des tissus qui puissent survivre dans le temps.
Ici encore, les jeunes pousses ont investi le secteur. Biobots, basée à Philadelphie, a levé 2,5 millions de dollars pour développer des imprimantes 3D à même de créer des tissus vivants. Les tissus vivants pourraient se substituer aux cobayes animaliers afin de tester des médicaments en laboratoire. De plus, grâce à eux, il serait possible de créer des tests individuels pour offrir à chaque patient un traitement personnalisé correspondant parfaitement à ses besoins. Le tout, grâce à un système peu coûteux, peu encombrant et peu complexe.
Le système d’impression 3D mis au point par Anthony Atala peut donner naissance à des os et du cartilage (Crédit: Wake Forest Institute for Regenerative Medicine)
Il y a quelques mois, un chercheur, le Pr Anthony Atala, se faisait connaître du grand public. Ce dernier est en effet parvenu à trouver une solution au défi de la survie dans le temps des tissus. « Pour une diffusion saine de l’oxygène, la distance maximale entre le lit capillaire et les cellules d’un tissu doit être de 0,2 millimètres. Parmi les innovations que comporte notre solution, nous imprimons en 3D des mini-canaux, sorte d’autoroutes, au centre de notre tissu, qui viennent alimenter les cellules en nutriments, ce qui maintient l’intégrité du tissu et assure la survie des cellules. L’outil que nous avons élaboré permet de créer des tissus synthétiques à partir de polymères à même de garder leur géométrie initiale », expliquait Anthony Atala à L’Atelier en mars dernier. Ce qui donne des bonnes raisons d’imaginer une évolution rapide de la chirurgie réparatrice mais aussi de la transplantation d’organes. Rappelons que selon l’UNOS (United Network for Organ Sharing), chaque jour 22 personnes en moyenne décèdent en attente d’une greffe d’organes aux États-Unis.
Pauline Canteneur
@atelier_us